Blanche/Katrina – images de répétitions © Philippe Weissbrodt

 

 

Fabrice Gorgerat – Cie Jours Tranquilles

Blanche/Katrina

ARSENIC
création | théâtre | 1h15 env.
Tarif unique: Fr. 13.- *
(* Fr. 8.- abonné-e-s Grand 8 et CityClub Pully)
Jeudi, 10.03, 19:00
Vendredi, 11.03, 21:00
Samedi, 12.03, 15:00
Dimanche, 13.03, 18:00
+ dimanche 13 garderie gratuite pour les enfants dès 2 ans – sur inscription au moment de la réservation
+ dimanche 13 atelier de théâtre pour les KIDS dès 7 ans sur inscription atelier@arsenic.ch
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Du personnage de Blanche, dernier avatar d’un romantisme décati dans un Tramway nommé désir, à Katrina, ouragan qui pulvérisa la Nouvelle Orléans en 2005, l’héroïne de Tennessee Williams serait à l’origine de l’effet domino qui aboutira à la destruction de la ville.

 

Du personnage de Blanche, dernier avatar d’un romantisme décati dans un Tramway nommé désir, à Katrina, ouragan dévastateur qui pulvérisa la Nouvelle Orléans en 2005, il y a une cinquantaine d’années. Nous sommes persuadés que l’héroïne de Tennessee Williams est à l’origine de l’effet domino qui aboutira à la destruction de la ville. D’un micro événement domestique à un phénomène global, il y a une histoire à imaginer, une tentative de mise en récit de la catastrophe. L’enjeu sera d’ériger Blanche en mythe fondateur d’un événement qui nous dépasse, d’une nature et d’un climat qui se dérèglent, et d’en extirper la possible poésie. En effet, les catastrophes laissent aujourd’hui encore l’humain dans une position tragique similaire à celle qu’éprouvaient les hommes de l’antiquité. Ces aléas ne sont certes plus attribués à la fureur des dieux mais ils contiennent toujours une violence et une part d’irrationnel qui renvoient l’homme à des interrogations ontologiques. Nous pensons que le lieu du théâtre est à même de renouveler ces interrogations, de leur donner forme et de les transcender. Il est urgent de transformer nos terreurs en œuvres d’art pour avoir un semblant de prise sur elles.

Blanche/Katrina est, après Médée/Fukushima et Manger seul, le dernier volet de notre triptyque sur les catastrophes contemporaines.
Pour ces trois pièces, nous avons choisi de collaborer avec des chercheurs, tant en sciences humaines qu’en sciences dures, afin d’élargir notre recherche dramaturgique. Nous avons mis en place une méthode de travail qui, à force de confrontations, pousse scientifiques et artistes dans leurs derniers retranchements. Nous avons pu vérifier sur Médée/Fukushima et sur Manger seul le bien-fondé de cette démarche. Lorsque l’on traite des catastrophes dans une perspective à la fois scientifique et théâtrale, le plateau devient rapidement le lieu de rencontre de l’irrationnel et de la science que, peut-être, seule la poésie peut concilier.

Dans sa critique de Médée/Fukushima dans le temps du 19 mars 2013, Marie-Pierre Genecand disait « Un tableau impressionniste à la force hypnotique, une proposition résolument poétique qui donne un corps, un visage et, pourquoi pas, une âme, à l’accident nucléaire ». 

C’est bien de cela dont il s’agit : s’emparer d’une problématique qui, au filtre de la science, paraît froide et lointaine – angoissante – et la décortiquer sur un plateau jusqu’à ce que l’humain en redevienne le centre. De l’objectivité revendiquée par les scientifiques à la fragilité de l’humain écorché, anéanti par les catastrophes, il y a un chemin, une aventure que nous voulons vivre avec les spectateurs. Fabrice Gorgerat

 

 

Plus d’informations

sur Plateaux.ch

Concept/Mise en scène:
Fabrice Gorgerat
Interprétation:
Julien Faure et Cédric Leproust
Performance et scénographie:
Estelle Rullier
Responsable scientifique:
Yoann Moreau
Musique:
Aurélien Chouzenoux
Stage son :
Emmanuel Guillod
Préparation physique :
Tamara Bacci
Costume:
Karine Vintache
Vidéo:
Marc Olivetta
Direction Technique:
Yoris Van den Houte
Administration:
Ivan Pittalis
Chercheurs associés :
Dominique Bourg, Olivier Glassey, Claude Joseph, Danièle c^Chaperon, Martine Hennard, Boris Vejdovsky, Christian Arnsperger, Antoine Guisan, Alain Kaufmann, Martial Genolet, Philip Clark
Remerciements:
Fiamma Camesi, Anabel Labrador, Nelly Niwa, Dominique Godderis, Lionel Haubois
Soutiens:
Ville de Lausanne, Loterie Romande, Pro Helvetia, Migros Pour cent culturel
Collaboration:
– Interface sciences-société de l’Université de Lausanne
– Projet Volteface UNIL www.volteface.ch

L’eau, l’encre, le sang, la poussière, des grains de riz, des clous, du lait, des cheveux, du verre brisé, de la terre… Fabrice Gorgerat aime la matière. Et les personnages féminins. Dans ses spectacles, qui sont autant d’immersions sensorielles, le metteur en scène lausannois confie souvent aux figures féminines le soin de réveiller ses fantômes. Car Fabrice Gorgerat est un fou de l’inconscient, cette part enfouie qui raconte l’être humain dans ce qui échappe, résiste, dérape et surprend. Qu’il se penche sur les conséquences d’une catastrophe nucléaire (Médée/Fukushima), le rapport père-fille (Poiscaille Paradis), le spleen provincial (Emma), le rituel du lever (Au matin) ou l’obésité (Manger seul), l’artiste aime voir au-delà du miroir, dans cette zone grise où s’agitent les non-dits, entre élans et tourments.

Son théâtre n’est pas un théâtre de boudoir ou d’alcôve pour autant. Fabrice Gorgerat ne plébiscite pas forcément la vitesse, ses tableaux peuvent se développer à un rythme très lent, comme si le temps arrêté permettait d’aller au cœur des sensations. Mais le metteur en scène ose l’excès, l’outrance, pour dire à plein l’outrage vécu par ses personnages. Emma à Payerne, double romand d’Emma Bovary, crève de solitude et d’ennui ? Les trois comédiennes qui restituent cette errance intérieure vomissent de l’encre noire après avoir ingurgité des litres de lait. Les spectres de Fukushima enragent de ne pouvoir montrer au grand jour la balafre nucléaire, cette catastrophe qui lamine sans bruit, ni odeur ? Les trois comédiennes, témoins de cette horreur, se hérissent de piques, crachent des clous, se scotchent les seins, s’arrachent les cheveux ou soufflent de la poussière sur une ville-cimetière. Formé à l’INSAS (Institut national supérieur des arts du spectacle), à Bruxelles, Fabrice Gorgerat utilise la scène comme un autel de la beauté furieuse, débordant de liquides organiques et d’éléments vivants. Les pièces de l’artiste lausannois sont des parcours où le travail sonore d’Aurélien Chouzenoux et les images d’Estelle Rullier tracent une direction, indiquent une intention. Peu, voire pas de texte, dans le travail de Gorgerat, ces dernières années. Comme si, pour lui, les mots étaient essorés, vidés de leur intensité, à force d’être utilisés. Ou alors, il faut que les mots soient dits en majesté. Comme cette conférence inaugurale dans Médée/Fukushima où Yohann Moreau, dramaturge associé, dresse le portrait de l’accident nucléaire, qui n’est pas la fin de quelque chose, mais le début lancinant d’une nouvelle et néfaste ère.

Fabrice Gorgerat aime la matière. Et les personnages féminins. Incarnés par des comédiennes impliquées, qui proposent, osent, alimentent la flamme sans trembler devant l’excès programmé. L’eau, l’encre, le sang, la poussière… Le théâtre de Gorgerat est une danse au profit du sens où l’humain est pisté dans ses recoins les plus secrets.  Un texte de Marie-Pierre Genecand à l’occasion des 20 ans de la Compagnie Jours Tranquilles (2015)