Prendre la réalité, la capter et la mettre à plat sur scène sans grand apprêt. Découper comme une tranche de vie, mais dans la largeur, pour exposer la société telle que nous la partageons : lisse, démocratique, saturée, blanche, indignée. C’est la méthode de théâtre documentaire que pratique Winter Family. Cette fois-ci, la performeuse Ruth Rosenthal s’installe dans les codes des fameuses conférences TED pour présenter les 9 features & apps d’un nouveau produit : le monde. Empruntant sa structure à Dante, le spectacle traverse donc neuf cercles : beauté, social-démocratie, amour, femmes, nourriture, jeunesse, capitalisme, multiculturalisme, joie. Soit No World/FPLL déclaré « volontairement populiste, apocalyptique et fun ».

En 2010, Winter Family a séjourné grâce au programme Villa Médicis – Hors les Murs de l’Institut français dans les quartiers populaires caribéens de Brooklyn à New York. Elle y a entrepris un travail d’écriture et de collecte inspiré par le concept « iconographie et circulation » développé par le géopoliticien Jean Gottmann en 1951 dans son livre La Politique des Etats et leur géographie. Durant deux ans, Winter Family a enregistré des sons, des images et des textes. Ainsi, tout a été prélevé dans la vie, tout est brut, comme jeté dans une esthétique basique, qualité MP3, impression de déjà-vu. Pour capter le flux, mimer la nausée, célébrer la passivité de notre temps, il suffit d’un imprimé Ikea, d’une boucle de Rihanna, d’un extrait de news. « Consommateurs hystériques et allocataires dépressifs, nous sommes le système ! », scande Winter Family. Et pourtant, No World/FPLL a pour refrain : Life is beautiful, et cherche à ouvrir une troisième voie, une échappatoire à ce monde qui like, qui share et qui mange.

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